L’Amiral Chaline et le Capitaine de Vaisseau Pierre Santarelli ont effectué un précieux travail en l’hommage des FNFL.
Une fois la Libération obtenue, les résistants et la population civile ne vivaient pas la situation de la même manière. Les civiles veulent récupérer un quotidien normal en passant rapidement à autre chose, tandis que les soldats s’attendaient à plus de reconnaissance pour les sacrifices commis.
Aujourd’hui encore, l’existence des FNFL reste très peu évoquée. Cependant, les FNFL ont existé, ils ont fait un travail des plus admirable et leur mémoire doit être honorée. Il faut sortir les Marins des Forces Navales Françaises Libres de l’ombre, arrêter de noyer leur existence dans le terme « alliés », dont 9 fois sur 10 on ne retrouve pas leur nomination sur la définition.
Fin 1944, il fallait réunir définitivement les Marins Libres et la Marine Nationale. Cela s’avérant impossible, ils en ont visiblement sacrifié une au profit de l’autre.
Août 1943
Le moral des marins de la France Libre est très haut. Les rapports des commandants d’unités combattantes sont unanimes :
Le moral de nos équipages est excellent. Ceux qui se trouvent à terre pour des cours ou pour un repos demandent avec insistance à réembarquer afin – comme me disait l’un d’eux – de pouvoir couler encore quelques sous-marins boches.
Ils espèrent tous remporter le succès contre l’ennemi et attendent impatiemment le débarquement en France.
Malheureusement et malgré une préparation de plusieurs mois en prévision, toute une partie des FNFL fut mise de côté pour les opérations du 6 juin 44. Michel y participait via le Chasseur 12 par pur hasard au départ, puis sur décision unilatérale de son commandant, désobéissant ainsi aux ordre de ses supérieurs afin d’y remorquer une barge avec des hommes et du matériel à proximité d’Omaha.
De l’été 44 à mai 45
Les équipages ont hâte de reprendre contact avec leurs familles. Cependant, ils ne comprennent pas pourquoi des délégations de la Marine Nationale ont pu prendre contact avec les habitants de Port-en-Bessin dès le 9 juin 44 alors qu’il leur faudra attendre juillet, voire même août 44 avant d’être autorisés de leur côté par leur commandement à descendre à terre.
Par ailleurs, aucune unité de Marins Libres FNFL n’est invitée à participer aux cérémonies présidées par le Général de Gaulle lors de la rentrée de la Marine Française à Toulon des 13 et 14 septembre 1944.
Ces deux évènements ont été beaucoup plus douloureusement ressentis qu’on ne se l’imagine. Ils avaient rêvé en récompense de leur courage, de leur ténacité pendant quatre ans, un retour au pays émouvant. Naïvement, ils croyaient que les victoires alliés étaient leurs victoires et c’étaient les autres qui récoltaient le peu de gloire qu’ils espéraient.
CRA 162 – Cdt Aconit du 01/10/1944 :
On a pu crier en France « Vive la Marine », aucun de nos hommes n’y étaient, aucun n’y est.

Citons l’Amiral Chaline et le Capitaine de Vaisseau Pierre Santarelli qui donnent ainsi leur retour sur la situation :
Le personnel est revenu de permission en général déçu par la mentalité des français, transformée par quatre années d’occupation et de privations. Le marché noir, inexistant en Grande-Bretagne, les révolte en même temps que la pénurie de denrées essentielles pour leurs familles les chagrine.
Ils ont retrouvé en France des hommes qui n’ont jamais été mobilisés et qui redoutent de l’être. […]
En mai 1945, le personnel des FNFL est déçu. Il a l’impression d’avoir été abandonné pour ne pas dire trahi par ses chefs. L’EMG n’a pas été capable, ou n’a pas voulu faire tomber les préjugés. La fusion des deux marines est un échec : les frères ennemis ne sont pas réconciliés.
Les réservistes qui sont déliés de leur engagement dans la France Libre vont quitter en masse la Marine Nationale. Seule une minorité restera, décidée à faire carrière. Elle se portera en quasi totalité, volontaire pour les opérations d’Extrême-Orient. C’est l’Indochine qui sera le creuset où vont se mêler dans une grande fraternité les marins venus de tous les horizons.
C’est là que s’effectuera lentement mais sûrement l’unité.
Historique des Forces Navales Françaises Libres – Tome 2, Services Historiques de la Marine
