Policiers/ Aventure

Les éditeurs classent ces romans dans le genre policier. Cependant, l’auteur y fait cohabiter l’énigme policière avec le fantastique qui lui est si cher, mêlé au gothique, à l’angoisse et à l’aventure.

C’est ainsi que le lecteur se retrouve face à des meurtriers assoiffés de vengeance qui ne cherchent qu’à faire justice de faits extérieurs dont ils sont parfois eux-mêmes victimes (La neige qui tue, On lui a fait mal), mais aussi de grandes maisons familiales lugubres dans lesquelles les murs abritent de nombreux mystères (Les nuits de Rochemaure, La Grande Bauche, Le mort veille). Ces demeures sont pour certaines le théâtre de véritables plans machiavéliques orchestrés par des éléments qui échappent au lecteur, admirablement bien tenus par le sens de l’intrigue de l’auteur.

Tout comme dans les romans fantastiques, les descriptions prennent un aspect si réel que nous vivons l’histoire !

C’est ainsi qu’en plein cœur de la forêt amazonienne, nous assistons à l’explosion d’une usine de trafiquants de drogue pour se retrouver ensuite dans les souterrains d’un manoir effrayant sur les terres françaises, cherchant ainsi le prochain code secret qui nous permettra d’en sortir vivant ! Chaque personnage devient un suspect potentiel et seule l’analyse des personnalités de chacun pourrait nous permettre de trouver l’assassin. A condition parfois qu’il y en ait un …

Différents thèmes y sont abordés : les ravages engendrées sur l’homme par les drogues dures et le trafic qui en découle (La neige qui tue), la cupidité face au véritable sens de la vie humaine (Le mort veille, La Grande Bauche), le syndrome post-traumatique des soldats revenus de guerre (On lui a fait mal) ou encore le décalage manifeste entre le sens de la justice par les institutions et sa véritable signification.


On lui a fait mal

Jean Savrot. Fait prisonnier en 40, à dix-sept ans. Réussit à s’évader en 43. Rejoint les Forces Françaises Libres. Débarque avec la 2ème D.B. Conduite héroïque, plusieurs décorations. Parlant couramment allemand. Se voit confier par les Services de Renseignements plusieurs missions en Allemagne de l’Est. Porté disparu en 47. Lors d’une mission.

Nous retrouvons Jean Savrot assassiné dans un appartement parisien quelques dizaines d’années plus tard. Cependant, les témoins voient ressortir ce même homme de l’immeuble d’un pas lent et déterminé juste après le meurtre … De nouveaux meurtres s’en suivent. Le Commissaire Vincent et l’Inspecteur Ribault ne comprennent plus, l’enquête s’avère longue et complexe : deux personnes disposant d’une seule et même identité ou bien la présence d’un homme qui, même mort, continuerait à tuer ?

L’assassin est décrit comme ayant le regard triste et erre dans les rues avec pour seul objectif de tuer trois personnes aux noms déterminés sans même prendre le temps de se nourrir. Il tente de se reposer autant que possible dans les égouts, au contact des rats. Paradoxalement, ce personnage est attachant et fait le titre du roman à lui tout seul.

Reste à connaître son identité ainsi que les raisons qui le poussent à tuer…


La Grande Bauche

Ce fut d’abord l’angle du toit qui m’apparut. Ce bout de maison ardoisée se détachant sur le ciel pâle dégageait une indéfinissable impression de malaise. Je n’en continuais pas moins à escalader le dur sentier jusqu’au sommet, et je pus voir alors se dresser devant moi, dans toute sa tristesse, le manoir de La Grande Bauche.

Un manoir à lui tout seul semble porter le mal être d’une famille se perpétuant depuis plusieurs générations. Le manoir de La Grande Bauche est totalement encerclé par des marécages, dans une région où la pluie et le brouillard y règnent en maitres.

Claude de la Passerelle fait suite au décès de sa tante connue pour avoir été particulièrement mauvaise tout au long de sa vie. C’est dans ce contexte qu’il invite ses amis les plus proches et ses cousins à venir passer quelques jours dans la maison familiale. Cette maison est effectivement particulière, et malgré son décès, la tante aigrie y reste omniprésente. Elle converti son patrimoine en pièces d’or et décide de les cacher dans un endroit secret de la maison. Comme indiqué dans son testament, ce sera donc celui des héritiers qui le découvrira qui pourra en disposer.

Des meurtres non élucidés s’ensuivent, tout le monde a la peur au ventre. Mais ce n’est pas tout ! Des flèches sortent des tableaux, des couteaux du plafond et les murs font du bruit … On y entend des pas, comme si une personne s’amusait à les traverser. C’est ainsi que nos personnages vont découvrir l’existence d’une maison parallèle au manoir de La Grande Bauche. Il suffit de trouver les codes pour y accéder. Ce manoir est un véritable gruyère, bourré de passages secrets plus horribles les uns que les autres et desquels on ne peut sortir que difficilement.

Le trésor s’y trouve peut-être, mais la cupidité aura-t-elle raison de nos protagonistes ? Quelle en sera la priorité ? Trouver le trésor ou le meurtrier ? Ceci dit, le risque de se faire assassiner à son tour demeure …

Michel Talbert joue sans retenue la carte du roman gothique alors fort en vogue dans le cinéma italien : manoir lugubre isolé dans la lande, passages secrets, trésor dissimulé, famille à l’histoire agitée, […] énigmes, disparitions et cadavres en cascade, et même une substitution d’identité pour couronner le tout. Il le fait sur un rythme allant crescendo et un sens de l’atmosphère si sûr, que le lecteur se laisse entraîner sans coup férir dans cet imbroglio fiévreusement ourdi (Jacques Baudou, Angoisse – Exploration d’une collection, Vol.1, Editions Artus Films, Sept.2021)


Le Mort Veille

La sensation de froid qui brusquement le saisit des pieds à la tête, le réveilla en sursaut. Il resta un instant immobile, les yeux ouverts dans le noir. Du dehors, lui parvenait à travers les rideaux grenat et les épais murs de granit, la tempête accompagnée du roulement sourd du tonnerre. « Cela vient des landes, pensa-t-il ; la ferme des jonques va en prendre encore un sacré coup ; comme il y a dix ans, lorsque la grande Pétronille est morte d’un seul trait de foudre. Un vrai temps de vampire en liberté ! »

Il crut soudain entendre un léger bruit dans la vaste chambre. En même temps, la tempête redoublant d’efforts, fit trembler les vitres à les briser. Il voulu se soulever. Il ne le put. Une force étrange l’en empêchait. Il s’affola, se débattit, essaya en vain de faire sortir un son de sa gorge nouée. Pendant ce temps, la pression qui le retenait à sa couche ne cessait de s’accentuer. Il comprit subitement qu’il ne pourrait rien contre cet affreux cauchemar. Il allait mourir. Tout allait être fini. Il eut alors une espèce de sanglot et s’abandonna à la peur hideuse.

Le vieil Oncle du Maroué, grande demeure familiale perdue au milieu de la curieuse forêt de Fénétrange, pousse son dernier souffle. N’ayant pas de postérité et doté d’une personnalité particulièrement macabre, il prit soin au préalable de rédiger un testament par lequel les prétendants à sa succession devront se réunir au sein de sa demeure durant quelques jours, dont l’interdiction leur sera faite de quitter les lieux, sous peine de déshériter l’intégralité du groupe. Cependant, le Maroué n’est pas une demeure commune … Un personnage étrange s’y déplace une fois la nuit tombée et ne cesse de faire couler le sang après son passage … Chacun craint pour sa vie, mais, tenus par la récompense promise à la clé, ils ne quitteraient la demeure pour rien au monde.

Jusqu’où ce plan machiavélique va-t-il les mener ?

Peu à peu, le récit se détourne du fantastique pour devenir un excellent roman policier, avec un mystère et une résolution dignes du canon holmésien. Mêlant avec justesse et distance des genres cousins, Michel Bernanos livre un divertissement de haute volée […] Il se hisse sans peine parmi les meilleurs auteurs de la collection Angoisse (Pascal Malosse, Auteur, Avril.2023)
Un deuil en trompe l’œil, un huis-clos étouffant, un fou conduisant une vengeance au motif aberrant, sans compter un assassin doué d’un étrange pouvoir acquis durement pendant la guerre du RIF. […] Un univers fantastique, gothique et frénétique, aussi belle qualité d’écriture que les précédents. (Jacques Baudou, Angoisse – Exploration d’une collection, Vol.1, Editions Artus Films, Sept.2021)


Les Nuits de Rochemaure

Couchée en chien de fusil, elle tremble de peur. Pour atténuer les violentes secousses de son corps, elle sert étroitement ses avant-bras entre ses cuisses moites. Sa position de fœtus ne l’empêche pas d’entendre gémir la marche de l’escalier. Dans une ultime révolte contre cette peur qui la paralyse, elle rejette la couverture qui lui masque le visage. Son corps se détend alors tout doucement, et ses yeux remplis d’angoisse se tournent vers la porte qui s’ouvre lentement …

Clotilde, toute jeune mariée, s’installe dans la maison familiale de son époux, le professeur Stanislas Durville. Le Manoir de Rochemaure, froid, sombre et trop mystérieux à son goût, est très isolé. Clotilde ne l’aime pas et son personnel non plus d’ailleurs. Son mari, accaparé par ses recherches scientifiques, a peu de temps à lui consacrer, elle s’y sent terriblement seule.

Quelqu’un lui veut du mal, elle le sent, elle le sait ! Mais qui ? Et jusqu’où cette chose serait-elle capable d’aller ? Son mari ne comprenant pas ses peurs, elle décide de faire appel à son cousin Richard afin qu’il puisse y rester quelques jours à ses côtés, et pourquoi pas, lui apporter son aide pour tenter d’élucider les nombreux mystères qui l’entourent.

Michel Bernanos n’a publié que trois romans Angoisse, mais ils ont suffit à le classer parmi les tout meilleurs auteurs de la collection. A lire Les nuits de Rochemaure, on comprend pourquoi […] Ajoutez à cela une écriture soignée et stylée et cela donne une œuvre mémorable qui méritait bien une réédition dans la collection Les Maîtres de la Littérature Policière des éditions du Rocher. (Jacques Baudou, Angoisse – Exploration d’une collection, Vol.1, Editions Artus Films, Sept.2021)


La Neige qui Tue
Sélectionnée pour le Prix du Quai des Orfèvres 1964

Une musique lointaine dans un tunnel noir… Des prés où l’herbe est bleue… Une lumière qui paraît verte… Et puis soudain, une douleur atroce montant du plus profond de son être… Un flot d’haleine chaude au fade goût de sang… Elle respire encore. On parle, on vit autour d’elle, mais elle sait qu’elle n’est plus tout à fait avec eux. La peur de la douleur qui demeure là, tapie au fond d’elle-même, prête à remonter, la poursuit au milieu de ses rêves. Elle vomit de la bile aigre comme la mort […]

Elle va crier, elle crie ! Mais elle a beau hurler sa souffrance, personne ne lui donnera la poudre blanche qui lui ferait chevaucher son superbe destrier d’or.

La sœur de Lorris, commissaire de police, succombe à overdose de cocaïne causée par l’horrible Tinant, grand Barron d’un cartel de drogue issu des bas fonds Brésiliens. C’est ainsi qu’il décide de prendre quelques jours de congés pour y faire un tour. Il va le poursuivre, il va l’avoir ! Cependant, ne pouvant éviter les dommages collatéraux, il se retrouve par la même occasion recherché par les services de police. Le Commissaire Bornand enquête, mais un détail le dérange : la manière de procéder de cet homme ne correspond pas à la personnalité de son ami Lorris. Pourtant, il lui ressemble physiquement en tous points.

Est-ce vraiment Lorris ? Est-ce que cet homme mystérieux arrivera à venger le meurtre de la jeune fille avant que la police ne le retrouve ?